Un entrepreneur est un individu qui porte un projet, cherche à résoudre un problème spécifique en essayant d’y apporter des solutions concrètes. Il a une vision, peut posséder des « skills » (compétences) et/ou s’entourer d’experts pour mener à bien son entreprise. En Afrique, si la notion est si simple, pourquoi observons-nous tant d’échecs ? Un entrepreneur, qu’il soit en Inde ou en Sierra Leone, reste un entrepreneur avec ses challenges et ses doutes. Maintenant, chaque région, chaque pays a sa spécificité culturelle et l’environnement qui y est associé. Alors quelles sont les principales faiblesses identifiées ?
L’amour du titre
« Entrepreneur », « Startuppeur », « PDG », « CEO », « Founder », « Boss »… autant de termes qui sonnent bien. Dire qu’on bosse sur un projet, qu’on a des partenaires et utiliser tout le jargon qui va avec est valorisant. Mais la réalité : très peu se sont réellement lancés, très peu s’investissent lorsqu’ils se sont lancés, très peu réalisent des chiffres lorsqu’ils se sont un peu investis…Qui a dit que c’était facile ? Et la galère est même une étape nécessaire dans la construction de son projet. Prendre les coups fait partie du jeu, mais se mentir à soi-même et mentir aux autres n’en fait pas partie. Beaucoup de jeunes africains affrontent la dure réalité du chômage, l’entrepreneuriat peut donc constituer une opportunité. Mais l’entrepreneuriat est bien souvent un refuge pour ceux qui n’ont pas su s’insérer correctement sur le marché de l’emploi.
L’obsession du financement
Nous savons que l’une des préoccupations majeures de beaucoup de jeunes porteurs de projets est le manque de financement et c’est tout à fait légitime. Comment développer un projet si on n’a pas un rond ? La réponse peut être la suivante : « c’est le projet qui fait l’argent, ce n’est pas l’argent qui fait le projet ». Une façon de dire qu’avant de penser à l’argent, essayez de savoir si votre projet existe. Asseyez-vous, mettez votre projet sur papier, étudiez les tenant et les aboutissant : business modèle, marché, principaux concurrents, organisation, structure de coûts, outils de conquête de votre clientèles etc. Ce n’est qu’à la fin, lorsque vous savez exactement dans quel « bourbier » vous mettez les pieds, que vous pourrez :
- Évaluer vos ressources et vos réels besoins de financement
- Développer vos moyens d’action
- Mettre en place des stratégies de financement.
Un adage connu dit ceci : « on ne prête qu’aux riches » et il n’y a rien de plus vrai. Un investisseur mettra de l’argent dans votre projet s’il voit que vous vous êtes déjà investit considérablement sans un sou. De même, un banquier ne vous prêtera que si vous mettez un apport initial en fonds propres et que vous lui présentez des bilans et des garanties solides. En gros, faites tout pour démarrer « petit » mais ayez une vision large pour le futur de votre activité.
Le manque de méthode et de discipline
Pas besoin d’être agrégé en physique pour monter son entreprise et la faire prospérer. Un minimum de méthode et de discipline est toutefois nécessaire. Vous êtes jeune, votre budget est serré et votre carnet d’adresse souvent vide. Quelles sont vos atouts ? Votre dynamisme, votre intellect, vos capacités interpersonnelles (vous êtes probablement fort sympathique). En gros vous avez plus de faiblesses que de forces donc vous devez jouer la carte de l’audace tout en restant très organisé.
Beaucoup de personnes veulent bruler les étapes, s’attaquer à un gros client par exemple, sans avoir testé son modèle chez un client plus modeste. Si le gros client te rejette violemment, cela peut donner un coup très sérieux à la réputation de ton produit ou service. La fougue est un atout mais il faut pouvoir s’assoir, réfléchir et élaborer la bonne stratégie pour développer son activité. Beaucoup abandonnent par frustration, car ils n’ont pas immédiatement le résultat attendu, or l’entrepreneuriat est également un long travail de développement personnel et d’autodiscipline.
1) La discipline financière/budgétaire
Éviter les dépenses somptuaires, payer des bureaux hors de prix pour impressionner alors qu’on vient tout juste de démarrer. Organiser des évènements hors de prix, des déplacements onéreux réguliers qui n’apportent rien à l’évolution de l’entreprise, payer (ou se payer) d’énormes salaires sans résultats.
2) La discipline morale
Ne faites pas les girouettes, adaptez-vous mais ne changez pas de modèle tous les quatre matins, restez fidèles à vos valeurs et celles véhiculées par votre entreprise, le client s’en rendra compte
3) La discipline professionnelle
Vous vous êtes laissé 72H pour rédiger un document, faites-le en 72H, évitez la procrastination. Plus vous procrastinez plus vous vous éloignez de la réalisation de vos objectifs donc de la réussite. Vous devez être la personne qui se donne ses propres coups de fouet pour avancer.
L’absence de mutualisation des expertises
Au début, par manque de moyens, on fait presque tout : rencontrer le client, rédiger les mémos, poster sur la page Facebook, passer la serpillère, porter les cartons, prospecter par téléphone etc. Mais très vite le porteur de projet doit pouvoir s’entourer. Ce cinéma ne peut pas durer éternellement et il faut pouvoir avoir l’honnêteté intellectuelle de reconnaître qu’« on ne sait pas tout. Avoir une idée vague sur un sujet ne fait pas de nous des experts et cette auto persuasion est très dangereuse lorsqu’on veut faire évoluer son entreprise.
On finit par avoir des managers champions du micro management, avec un œil, un avis et des décisions sur tout.
Plus l’entreprise grandit plus l’entreprise doit survivre. En gros, déléguer et mettre en place des stratégies d’autonomisation et de responsabilisation de l’équipe est essentiel. En donnant confiance à ces futurs managers, ils gagneront en efficacité et seront des acteurs clés du développement de l’entreprise. En externe, faire appel de temps à autres à des consultants ou expertises ponctuelles ne fait pas de mal à la structure. Une entreprise a besoin d’absorber des idées, de la créativité et des approches différentes afin d’innover et de rester compétitive.
Le mimétisme et l’effet de mode
Quelles sont les raisons qui poussent certains à se lancer ? « Il a fait, ce n’est rien, moi aussi je peux faire ». Certaines personnes se lancent mais ne savent même pas pourquoi elles se lancent. Il ou elle a créé sa marque, çà marche bien pour elle, « je vais faire la même chose ». Certes, il y a de la place pour tout le monde et à partir du moment où nous vivons dans une économie de marché chacun peut se lancer dans le domaine qu’il souhaite, et cette personne n’a pas à demander la permission. De même, on peut voler l’idée de quelqu’un mais pas le plan. Les motivations ne seront pas les mêmes, les objectifs ne seront pas les mêmes et les valeurs que l’on souhaite que la marque incarne ne seront pas les mêmes.
Il faut se rappeler que nous sommes tous différents et avons chacun notre histoire. Sur nos marchés, nous avons vu de misérables « copier/coller » s’effondrer misérablement car la vraie motivation du porteur de projet n’était pas de développer une structure pérenne mais d’abord de faire du mal à quelqu’un (empêcher la réussite d’une personne jalousée) ou peut être de devenir « célèbre » (un notable reconnu au quartier pour sa « supposée pseudo-puissance financière »). C’est comme l’exemple « fictif » d’un entrepreneur qui va engloutir des centaines de millions de FCFA pour monter un bâtiment de 5 étages, sans parking, avec son nom gravé en gros dessus mais depuis 5 ans personne ne veut louer. Il a atteint son objectif : « tout le monde connaît mon nom »…mais quelle est la finalité ? Constituer un actif pour s’endetter et refaire la même chose encore et encore ? C’est le paradoxe de certains promoteurs africains.
D’autres profils existent, aujourd’hui des impostures sont démasquées et des jeunes n’hésitent plus à s’inventer une vie, une réputation, des photos…Sur fonds de marketing digital. Chacun a le pouvoir de développer quelque chose de grand, peu importe son domaine d’activité. Le tout est de rester VRAI et AUTHENTIQUE. La starification du net a fait perdre la notion du vrai et du faux à beaucoup de jeunes talents qui ont réellement envie de se lancer et créer de la valeur pour leur pays.